PAROLES

Hier encore, j’avais 20 ans
Je me voyais avec des mocassins à glands
Permis côtier, bateau de plaisance
Et des grosses sommes aux vertus apaisantes
On passe la moitié de sa vie à retenir sans comprendre
Et l’autre moitié à comprendre sans retenir
La vie c’est bizarre mi amigo
La mort nous fait des signes de têtes amicaux
Je voulais devenir vendeur de musc
Blanchir un pеu d’argent chez les rе-fré mus
J’avais truandé quelques PS1
En les pesant au rayon fruits et légumes
On voulait tous devenir dockers
À 30 ans déjà avoir sa maison de maître
Les gars se coinçaient les doigts dans les conteneurs
Pour toucher une rente à vie de la Cotorep
Faut payer les traites, faut payer le cred
Et le train de vie pour les décarrades en boîte
Faut graisser les pattes, faire des dessous de table
Pas de galère je connais une gadji déclarante en douane
Ou étudiante en droit, je sais plus
Tous les corps de métier sont détournés dans la rue
Une nourrice n’en est pas une, ici c’est pas un animal, une mule
Hier encore j’étais niya, je parlais déjà comme un Imam
Je voulais ouvrir une pizzeria
Toute Hallal je l’aurais appelé le Riyad
Sans être rital, sans être arabe
Sans même savoir situer cette capitale
J’étais bizarre, j’étais minable
Je lisais le Coran comme une écriture comptable
Et je supportais mieux le regard de Dieu
Que le regard de tous les autres gens
Et je ne savais plus ce qu’il y avait de mieux
Entre plaire aux gens ou bien plaire aux anges
J’étais tellement petit qu’aujourd’hui
Quand je me regarde j’en ai le vertige
Je croyais être dans le film, j’étais qu’acteur de reconstitution de scènes de crimes

Hier encore j’avais des exemples, des gars à qui je voulais ressembler plus tard
Mais j’ai vu tomber toute mes légendes, l’une après l’autre devenir soulard et queutard
Quelque part c’est la meilleure leçon qu’ils m’ont donné, celle de ne jamais déifier
Après tout l’Abbé Pierre a commis le péché de chair et paraît que Mère Teresa se masturbait
Que Malcolm X était amateur de whisky, comprends que même des humanitaires je me méfie
Je crois que les stars des Restos du Cœur sont surcotées, ils ont le cœur sur la main mais le poignet coupé

Hier encore j’écoutais Aznav, et le track Demain c’est loin d’Iam
J’ai vu les paroles dans le rap se nachavent, j’aurai ma certif quand on m’ôtera la prostate
T’façon le disque d’or c’est nous qu’on le paye, c’est comme la légion d’honneur on paye la médaille
Ça a le goût amer, d’un rêve qui se réalise bien trop tard
Et quand les jeunes rappeurs me lancent des fleurs, c’est pour savoir si je peux les ramasser encore
Ça kick fort depuis Hardcore, eux n’ont pas de coffre mais des mimiques de tiktokeur
Et quels grands poètes auraient-ils pu faire, si seulement ils avaient quelque chose d’intéressant à dire
Ils cherchent plus à connaître, ils cherchent à se faire connaître, moi même quand je pleure et bien je pleure en rime
Je me présente je m’appelle Médine, et j’aimerais bien réussir ma vie
Être heureux gagner de l’argent, avec mes frères, mes amis d’enfance
Car je me méfie de ceux qu’ont plus d’amis d’enfance, c’est les mêmes qui donnent des leçons de fraternité
Ceux qui éduquent les gosses des autres mais pas les leurs, ils seront jamais de bons parents comme Dorothée
Hier encore j’voulais être quelqu’un, je voulais devenir un homme bien ou rien
Je crois que j’ai réussi un peu à devenir les deux, je me sens comme un bourgeois élevé par les gueux
J’ai pas fait d’études, j’ai pas fait de thunes, mes relevés de banque c’est mes bulletins scolaires d’adultes
Haute couture, sapes de luxe, y’a 3 ans j’étais encore à la CMU
Mais le luxe c’est pas le contraire de misère, c’est le contraire de vulgaire
Ça c’est tout ce que je veux plus être, grossier dans ma façon d’être
Je faisais du bruit comme à Châtelet, un bruit d’enfer avec mon chapelet
Je me cherchais une identité, j’ai trouvé du prêt-à-penser
Aujourd’hui je veux plus vivre dans le regard d’un autre, qui va me juger chaque fois que je vais pêcher
Le mouton passe sa vie, à avoir peur du loup , pour finir par être mangé par le berger
Tout ça n’était qu’une aventure musicale qui ne devait pas dépasser le garage familial
Que le Seigneur préserve mon père AbdelOuahab, de finir SDF comme le père de 6ix9ine
Amin

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