PAROLES

[Journaliste:]
Bonsoir à tous et à toutes, vous êtes en direct du journal de la rue présenté par Nasha
La miss Nasha qui a le plaisir de recevoir ce soir le rappeur Dosseh
[Dosseh:] Si, si
[Journaliste:] Bonsoir
[Dosseh:] Bonsoir
[Journaliste:] Alors, on a déjà eu l’occasion de t’entendre dans différentes compiles, mixtapes…
[Dosseh:] Ouais
[Journaliste:] Mais aujourd’hui, tu es venu nous présenter ton premier projet solo
[Dosseh:] Ouais, ouais
[Journaliste:] Alors pour ceux qui ne te connaissent pas, est-ce que tu peux te présenter en quelques mots ?
[Dosseh:] Ouais, ben, moi c’est Dosseh, donc rappeur du 45, et voilà, j’ai fait quelques petites mixtapes, des petites compiles et donc, là, j’ai décidé de sortir un truc en solo
[Journaliste:] OK, merci. Écoute, j’ai écouté ton album et j’ai remarqué que t’avais certains textes assez violents…
[Dosseh:] Ouais
[Journaliste:] Et même l’ambiance en fait, générale, était plutôt sombre
[Dosseh:] Ouais, ouais
[Journaliste:] Alors moi, j’me demande où est le sourire dans ta musique ? Où est la joie ?
[Dosseh:] Ben, disons que quand on rappe, tu vois, on essaie de retranscrire un peu ce qu’on vit, ce que nos frères vivent donc voilà, t’as vu, le quotidien il est pas toujours rose, et forcement ce qu’on rappe, t’as vu, tu sais, c’est à l’image de tout ça, et forcement les textes ils sont durs parce que…

Parce que du sang de martyr circule dans mes artères
Parce qu’ils tiennent mes semblables à terre, qu’ils traînent mon histoire dans la merde, qu’ils déblatèrent
Parce qu’ils refusent qu’on relève la tête
Parce qu’on a ce passé lourd de peine qui nous brise les vertèbres, j’ai le gène de la haine
Parce que “Je déteste” est plus facile à dire que “J’aime”
Et parce que tout ce dont j’ai rêvé ne correspond pas à la vie que j’mène et que j’ai pas eu de veine
Parce que j’sais que Dieu me surveille quand le diable me suggère
Parce que j’emmerde les juges et leurs préjugés à notre sujet
Parce qu’on a trop de frères coincés dans le carcéral, trop de pères qui râlent
Et de mères au bord des larmes, qu’on est tous pris dans la spirale du mal
Parce que trop de conflits se résolvent à l’aide d’une arme
Parce qu’entre nous et les forces de l’ordre, y a peu de chances pour une paix durable
Parce qu’on est sur le tranchant du sabre comme pris au piège
Parce que dis-moi, qui te protège quand des cons de flics te font mordre la poussière à t’en faire chier du sable ?
Parce qu’ils sont tous tes soi-disant potes si t’en as plein les poches
Parce que l’amitié s’enfuit par les fenêtres quand le malheur frappe à la porte
Parce qu’on ne mendie pas de l’aide, qu’on est trop fier et que si notre avenir bat de l’aile
C’est qu’on procède avec des pratiques pas hallal
Parce qu’on se nique entre nègres et crouilles comme des abrutis
Pour des broutilles, on s’embrouille, on sort les outils pour se prouver le poids de nos couilles
Parce que ma mère au bord de la crise de nerfs menace de me fiche dehors
Parce que nos fiches de paye ne sont que le reflet de mon triste sort
Parce que la vie, c’est gore, qu’un frère rentre lorsque l’autre sort
Qu’après le chtar, les chances de réinsertion sont minces, négro, ai-je tort ?
Parce que le pouvoir est détenu par des fils de porcs
Pour les frères aux assiettes ou en correctionnelle, j’vous souhaite un vice de forme
Parce qu’il y a la France d’en haut et la France d’en bas
Qu’on a vécu une adolescence dans le hall, qu’on en bave et que les hautes instances s’en battent
Mais on a le cœur brave, on n’attend rien de leur part, on se leurre pas
C’est bien nos vies que les médias vous servent en pâture à l’heure du repas
Parce que les jours passent, que le monde ne sait toujours pas qui est Doss’
Et parce que j’suis pas à l’abri que l’ange de la mort ne se penche sur mon dossier
Qu’à défaut de rêve américain, ce qu’on a, c’est le cauchemar français
Man, j’ai la peau noire comme mes pensées
Parce que leur système accentue le faussé entre les classes sociales
Que j’suis cet individu grossier, associable, insatiable, coupable du délit facial
Si j’fusille le monde de mon regard glacial
C’est que chez nous les mômes crèvent alors qu’on dépense des fortunes pour la conquête spatiale
Qu’il y a pas de justice impartiale, qu’on nous traque sur l’asphalte pour un peu de gent-ar sale
Tandis que les vrais gangsters opèrent dans les hautes sphères
Parce qu’on se perd à chercher le paradis ici car là-haut frère
C’est peut-être l’enfer qui nous sera offert
Parce que j’ai pas de beau fer, toujours pas ma gueule en poster ni de villa aux States
J’me sers du mic comme d’un flingue, un homme doit die quand je le sors de mon holster
Parce que cette époque est complexe
Et que je t’écris des textes crades comme certaines pratiques du sexe : Pédophilie, inceste
Beaucoup de haine, de l’amour, juste un zeste
Et ma vérité blesse, refuse ou accepte, c’est le [?] Ie siècle

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